L’artiste

« Une œuvre de Guy Mansuy, c’est parfois un petit musée de la vie déformée et rejetée, ou une construction cadencée et rythmée d’hommages. Mais le plus souvent c’est une icône sans perspective évidente qui veut juste nous rappeler le visage de la vie simple et humble, qui nous sourit chaque jour de toutes ses couleurs et qu’on abandonne si volontiers pour le neuf vaniteux et trompeur. Le mystère n’est pas caché au fond de cette image donnée, il est entre elle et nous. Elle ne nous éclaire que si on veut bien la prendre pour ce qu’elle est. On y voit tous ses traits, ses rainures autant que des rides, ses variations de tons et de luminosité. On peut la toucher si on ose et lire comme du braille des matières rugueuses ou douces. On ressent un rythme presque comme une musique entraînante dont on aurait oublié la danse. Alors le mystère s’installe. De cette architecture, de cet assemblage, de ces couleurs, de ces matières nait un voyage poétique qui s’égraine autant par des sons, des mots des phrases que par des images. Ils et elles sont parfois archaïques, parfois d’une banalité quotidienne. Mais au fond de ce mystère on sent que le beau est à portée de main. Que la mémoire est aussi celle du présent, que l’on peut construire avec rien et que l’usure n’est qu’une impression. Que rien n’est vraiment oublié. Que chaque bout de vie a sa place dans la création et que du plus humble moment peut jaillir la plus grande harmonie.

Et de cette harmonie des choses de la vie et du temps, de cette récupération, de cette construction, Guy compose une musique. C’est peut-être pour cela qu’il se balance tout le temps en fait… Mais toujours vers l’avant »

Guillaume Gallienne, Extrait du livre Guy Mansuy, Editions Galerie Capazza, 2014

Oeuvres

« Guy Mansuy développe une œuvre dont la couleur est à son zénith. Il s’en fait le chantre,
l’encenseur, le thuriféraire. Il en fait l’éloge. Fort d’une approche empirique qui ne s’embarrasse d’aucune doxa, il s’applique à en célébrer l’infinie richesse de ton, d’espace et de sonorité. Tour à tour chaude et froide, silencieuse et bruyante, ramassée et étendue, la couleur est chez lui à l’unisson d’une vision du monde en perpétuel mouvement dont il tente de capter, d’une œuvre à l’autre, un instant ébloui. De restituer l’écho coloré d’une présence ».

Philippe Piguet, Extrait du livre Guy Mansuy, Editions Galerie Capazza, 2014

« Guy Mansuy ne renonce pas à être l’hôte rigoureux et patient des bois et des forêts où il rôde autour de l’origine essentielle du carton qu’il va plier, découper et puis coller selon son propre rythme. A la manière d’un personnage de Jacques Prévert, quand il voit un arbre il voit déjà le papier ou le carton qu’il va sélectionner, découper puis coller à côté d’autres objets issus d’une autre forêt. Il sait comme le fait remarquer René Char à propos de son ami Georges Braque que « l’art est une route qui finit en sentier, en tremplin, mais dans un champ à nous ».

Guy Mansuy nous offre plusieurs champs. Ils sont tous fabriqués, irréels et surprenants. Son style s’impose et nous enchante car les formes et les couleurs s’amusent dans un espace qui n’appartient qu’à l’artiste. Déplacés mais non exilés, les matériaux usés connaissent une deuxième vie, celle-là au moins est promise à une musique composée par le désir et le jeu. Les tableaux sont alors des miroirs où persistent quelques souvenirs dont on ignore l’identité et l’origine, mais comme disait Jean Cocteau, ils les font réfléchir ».

Tahar Ben Jelloun